« Voyage en cultures », « Histoires partagées » : dans le quotidien de la Cité éducative
Reportage
Mise à jour le 06/05/2025

Depuis 2022, la Cité éducative de Paris 18 mène diverses actions en faveur des enfants et des jeunes dans l’arrondissement. Parmi les divers projets imaginés pour mener à bien ses missions, certaines sont pensées sur le long cours. Tel est le cas du programme « Voyage en cultures », travail réalisé en plusieurs sessions sur le thème de la laïcité, ou du projet « Histoires partagées », qui met le conte au service du plaisir de lire.
Voyage en cultures : les élèves à la découverte des religions monothéistes et de la diversité des convictions.
Dans le cadre de son volet « citoyenneté », la Cité éducative a construit, sous la direction de Mariannick Dubois Lazzarotto, autrice et formatrice sur le dialogue interconvictionnel, un « voyage » en cinq étapes au cœur des croyances. Objectif : favoriser un dialogue culturel et un sentiment de vivre-ensemble en présentant de façon pédagogique les grandes religions monothéistes. Ainsi depuis 2022, une douzaine de classes de CM1-CM2 a pu assister aux cinq séances (parfois plus, si l’attention et la compréhension des élèves le demandent) préconçues en amont par la Cité éducative :
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une séance d’introduction animée par un médiateur, qui consiste à « armer les enfants de connaissances scientifiques et historiques pour les distinguer des mythes de création et des croyances » ;
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trois sorties, en partenariat avec le Musée d’art et d’histoire du judaïsme, l’Institut du monde arabe et la Basilique-Cathédrale de Saint-Denis, durant lesquelles un médiateur présente les trois religions monothéistes ;
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une séance de conclusion menée par un enseignant.
Dans ce cadre, nous avons participé, avec des élèves de CM1 et de CM2 de l’école élémentaire Charles Hermite, à la visite de l’Institut du monde arabe. Éclairés par la médiatrice Marie-George Nida (impliquée dans le projet depuis son lancement), ces derniers ont pu observer divers objets et reliques du musée, et profiter des explications factuelles de leur guide. Avant cela, place à un petit point géographie. Quels sont les pays arabes ? Pourquoi les appellent-on ainsi ? Dans quels pays se situent les plus grandes populations musulmanes ? On en passe, et des plus difficiles, auxquelles les jeunes élèves ont la plupart du temps répondu juste. « On met un point d’honneur à leur enseigner des notions de géographie, à leur ouvrir l’esprit. On tient à ce qu’ils sachent qu’il n’y a pas que Paris, qu’ils peuvent voyager », nous chuchotera une enseignante.
L’importance du pluralisme des convictions
La carte des pays arabes décryptée, nous voilà tous dans l’ascenseur, en route pour aller observer les trésors de l’Institut. Anciens exemplaires du Coran, représentations du sacrifice d’Ibrahim, khamsa (main de Fatma), tenues traditionnelles… Marie-George Nida s’arrête devant divers objets pour mieux raconter les traditions et les mythes, sans jamais déroger à la règle qui semble être la sienne : poser des questions aux enfants et les faire participer avant de leur transmettre son savoir. Et force est de constater que, sages et volontaires, les enfants sont intéressés par les sujets abordés, avec lesquels ils semblent familiers. Suivant la logique du programme, même chose a été faite au Musée d’art et d’histoire du judaïsme et à la Basilique-Cathédrale de Saint-Denis les semaines précédentes : « L’idée, c’est de communiquer aux enfants des données positives sur les différentes civilisations, de mettre en avant les éléments communs des religions monothéistes, et de montrer qu’on peut ne pas avoir de religion, en avoir une ou même en changer », nous explique Mariannick Dubois Lazzarotto.
« Histoires partagées » : des contes pour donner goût à la lecture et resserrer les liens
Aimer les histoires pour apprendre à aimer lire
Depuis novembre 2024, un dispositif bien particulier est testé à l’école élémentaire Dorléac. Coordonné par l'artiste et conteuse Praline Gay-Para, le projet a deux objectifs : le premier, donner le goût de la lecture aux enfants en leur transmettant des histoires de façon orale, en cache un plus discret. Il faut décrire ce qui se passe durant les soirées contes menées par Praline, pour le comprendre.
Ainsi nous y sommes-nous rendus, un soir de novembre. Sous le préau de l’école Dorléac, des bancs et des chaises ont été installés face à un grand rideau noir. Juste assez pour assoir la trentaine de personnes, parents et enfants, qui s’y sont réunis pour écouter Praline Gay-Para et son invité Thierno Diallo. Tous deux sont conteurs. Ils racontent des histoires, d’hier et d’aujourd’hui, d’ici et de là-bas, aux enfants comme aux adultes. Parce que « aimer les histoires, c’est aimer écouter les autres », nous a confié Praline. Et aimer les histoires, ça peut être aimer les écouter, mais aussi les lire. D’une façon poétique et détournée, les élèves de l’école élémentaire sont appelés à apprécier les histoires, quelle que soit leur forme… Pour mieux en appréhender, pourquoi pas, leur format écrit et ainsi les livres.
Resserrer les liens entre parents et personnel scolaire
En alternance, la conteuse et le conteur ont capté l’attention du public, auquel il a été demandé de participer en répétant, en complétant, en donnant de la voix pour accompagner la leur. Enfants et parents ont largement joué le jeu, happés par la fascinante oralité des deux intervenants. Une oralité derrière laquelle se cache une volonté cachée des concepteurs du projet : voir des parents volontaires prendre le relais et raconter leurs propres histoires.
Le soir où nous nous sommes rendus à l’école élémentaire Dorléac, un papa et deux mamans ont accepté de poursuivre l’aventure avec la conteuse, pour eux-mêmes en endosser le costume. De quoi nourrir l’un des piliers de la Cité éducative qui consiste à resserrer les liens entre les acteurs de l’éducation, ici les parents et le personnel enseignant. « Dans les sociétés traditionnelles, raconter des histoires est une façon de faire commun. On se réunit, on se rassemble, on partage. Les contes sont une langue poétique, symbolique, que chacune et chacun interprète comme il ou elle le souhaite avec son vécu personnel, sa vision du monde, son émotion », s’enthousiasme Praline Gay-Para.