Déconnexion assurée au Jardin des Traverses

Reportage

Mise à jour le 04/11/2024

Jardin des traverses
À Paris, on rêve de flâner au milieu des plantes, de goûter une framboise jaune au détour d’une balade (Connaissez-vous ? C’est délicieux !), de siroter un verre sur un tronc d’arbre loin du bruit des voitures… C’est désormais possible dans le 18e, au Jardin des Traverses. Ce tronçon de la Petite Ceinture, entre la porte de Clignancourt et la rue des Poissonniers, est une véritable parenthèse de verdure dans l’arrondissement. La volonté de l’équipe municipale d’ouvrir ce lieu au public en accès libre est désormais réalisée. Balade immersive.
Il traverse le 18e, depuis la porte de Clignancourt jusqu’à la rue des Poissonniers, sur une superficie de 7 500 m2. C’est d’ailleurs le plus grand site intra-muros de Parisculteurs. Énorme ! Il traverse les époques, mêlant plantes et techniques d’autrefois avec climat, influences ou encore connaissances d’aujourd’hui. Il traverses les générations, les styles, les cultures. Toutes les cultures : maraîchères, potagères, artistiques, d’ici et d’ailleurs…
Le Jardin des Traverses, c’est un bout de la Petite Ceinture qui tisse des liens, fraye un chemin, trace un passage. Inauguré fin septembre 2024, ce projet qui tenait tant à coeur à l’équipe municipale du 18e est désormais ouvert au public gratuitement. Nul besoin de consommer ou de participer aux événements pour profiter de cette parenthèse de verdure en ville : le jardin, pensé avant tout pour les habitantes et habitants du 18e, est accessible librement, aux horaires des parcs et jardins de la Ville de Paris.
Après avoir franchi les marches qui nous mènent à cet endroit hors du temps, difficile de résister au charme de cette ancienne voie de chemin fer totalement réaménagée : chaussée légère, serre, système phytosanitaire, bar associatif, guinguette, jardinières fixées le long de la coulée, containers… Le lieu invite les curieuses et curieux à la découverte.

Un travail de longue haleine

Il aura fallu 5 ans et un immense travail pour en arriver là.
- En 2019, le collectif gagne l’appel à projets et l’association Jardin des Traverses est créée. Elle réunit Green résistance, Vergers urbains, Léo Lagrange ainsi que l’agence WAO architecture.
- Mais le Covid (2020-2021) met en pause tous les projets, pendant près de deux ans.
- Le permis de construire est toutefois élaboré pendant cette période et est déposé en 2023.
- Le 3 mars 2024, l’association récupère les clés du lieu et les travaux peuvent enfin commencer.
- Durant l’été 2024, le Jardin des Traverses ouvre ponctuellement, en avant-première, pour des événements type concerts, expositions, résidence de chef.fes avec la Chope des artistes… (le festival Rhizomes notamment).

Une partie des bacs reviendra aux écoles du quartier, à la restauration proposée sur place mais aussi aux riverains.

Germain Lainard
paysagiste concepteur et fondateur de l’association Green Résistance

Pour rendre le jardin accessible et agréable, de nombreux aménagements ont été entrepris. « Nous avons commencé par débroussailler le tout car il y avait énormément de végétaux, d’arbres morts, de déchets aussi. On a piqué les cordeaux et installé les emplacements pour les plantations », détaille Germain Lainard, paysagiste concepteur et fondateur de l’association Green Résistance. Pour les plantations justement, rien n’a été laissé au hasard : les conteneurs sont espacées de 3 mètres du pont (obligation réglementaire) ; les fondations pour accueillir les bacs ont été réalisées en amont car il faut un mois de séchage, les bacs de plantation demandent 160 m3 d’apport de terre…
Trois niveaux de plantations sont organisés, tous exposés plein sud : les bacs appuyés contre le mur sont destinés aux plantes grimpantes car le sol est profond. Les bacs entre les rails accueillent des végétaux rasants sur l’eau et les bacs le long du chemin pour les personnes à mobilité réduite sont plutôt pensés pour les végétaux produisant des petits fruits. Pour le moment, ils sont principalement cultivés pour les usages du Jardin des Traverses. Dans un second temps, « une partie reviendra aux écoles du quartier, à la restauration proposée sur place mais aussi aux riverains », complète Germain Lainard.

Un jardin en pleine mutation

En pleine mutation, le lieu se développe et grandit au fur et à mesure. Par exemple, une deuxième serre verra certainement le jour prochainement. Pour traiter les eaux grises non raccordées au réseau d’eaux usées pour le moment, un système de bacs a été testé avec des végétaux de phytoépuration à l’intérieur. Peu concluants, ces bacs vont être remplacés par des baignoires, beaucoup plus efficaces. Aussi, un projet de wagon resto-bar se dessine. Il est question d’une cabane au bout du jardin pour y stocker les outils et faciliter l’entretien du lieu. Des ombrières seront aménagées avec des bâches des Jeux de Paris 2024 et du matériel issu du Club France, comme héritage des Jeux.
Et surtout, de nombreux événements, concerts, expositions, chef.fe.s en résidence, ateliers DIY, street art, marchés locaux et autres partenariats avec des établissements scolaires du 18e (le collège Mayer notamment) permettront de faire vivre ce lieu fabuleux. Il deviendra aussi un lieu de formation en insertion autour de l’agriculture urbaine. Le Jardin des Traverses, c’est un espace unique, en évolution constante, qui nous dévoile petit à petit ses secrets et son potentiel immense. C’est certain, cette belle aventure d’agriculture urbaine ne fait que commencer, pour notre plus grand plaisir !

Une leçon maraîchère qui réveille nos sens

Long de 800 mètres, le jardin des traverses est un espace de promenade propice à la flânerie, aux découvertes, à la culture. On a suivi Germain Lainard, fondateur de Green Résistance, au cours d’une balade urbaine. Quelle n’a pas été notre surprise de goûter des framboises jaunes, de sentir la délicieuse menthe fraise, de se dégager les poumons en respirant la verveine, la mélisse ou le basilic. On a découvert l’ail d’Afrique du Sud, les Tulbaghia, qui ont le goût de l’ail des ours mais qui ont l’avantage de pousser toute l’année. Ou sa cousine la ciboulail (ou ciboule de Chine), un savant mélange d’ail et de ciboulette. On a gouté le raifort (utilisé pour reproduire le goût du Wasabi), la ciboulette, l’estragon, la livèche… On a récolté quelques aubergines, courgettes et tomates vertes qui serviront pour des sauces… Les idées ne manquent pas pour déguster toutes ces plantes : tisanes, sauces, sirop, plantes à sécher, fleurs décoratives comestibles… Une belle leçon de végétaux qui donne l’eau à la bouche !
Le saviez-vous ?
La rhubarbe pousse plutôt à l’ombre. Il faut éviter une exposition plein sud, où le soleil et de trop fortes chaleurs pourraient l’endommager.

La livèche
est aussi appelé céleri perpétuel. C’est une plante aromatique herbacée vive et très vigoureuse. Elle est l'ancêtre des céleris rave et branche, d’où son arôme anisé. Parfaite pour les potages et les plats d’hiver !

La menthe fraise est une variété de menthe verte qui rappelle le parfum des fraises. Surprenant mais exquis !

Le raifort est utilisé en Europe pour reproduire le goût du wasabi (une plante originaire du Japon).
Green Resistance est une association qui tend à préserver l’environnement et la biodiversité et à promouvoir la culture sous toutes ses formes, à travers le paysage, la construction et l’art.
Vergers Urbains est un collectif ayant pour but de rendre la ville comestible, par un large éventail de modes d’action des jardins partagés à l’espace public.
La Fédération Leo Lagrange porte un projet d’intérêt général et fonctionne démocratiquement. L’association oeuvre pour donner à toutes et à tous les moyens de s’épanouir tout au long de la vie en oeuvrant dans les domaines de la petite enfance, l’animation et la formation.