BeCosmo, une communauté unique née à Charles Hermite

Reportage

Mise à jour le 04/10/2024

un atelier d'artiste du projet becosmo à Charles Hermite
Mettre à disposition des appartements vacants de Paris Habitat à des artistes, des artisans et des entrepreneurs de l’économie sociale et solidaire (ESS), c’est le projet unique en son genre BeCosmo porté par Be-Association. Implantée depuis février 2023 dans le quartier Charles Hermite du 18e, cette communauté est devenue un acteur incontournable du quartier.
Le point de départ de ce projet inédit : le programme de travaux lourd (Plan Paris Climat) annoncé par Paris Habitat pour la résidence Charles Hermite en 2021. Cet ensemble immobilier de 1 297 logements construit en 1935 est en passe de rénovation pour répondre à plusieurs objectifs : réhabilitation, désenclavement, diversification. Au fil des départs, les logements ne sont pas attribués et certains locataires en place sont relogés dans d’autres résidences en vue des travaux.
Zoom sur…la réhabilitation de Charles Hermite
Construit en 1935, le programme Charles Hermite (18e) est le témoin de l’histoire du logement social parisien. Des immeubles composés d’habitations bon marché (HBM), en briques rouges, construits à l’emplacement des anciennes fortifications de la ville au premier tiers du 20e siècle. Paris Habitat a porté, pour cette résidence, un projet de réhabilitation Plan climat dans un objectif de diversification de l’offre et de désenclavement.

Une occupation "intercalaire" de 61 logements

C’est là que la communauté Be, spécialiste de l’hybridation depuis 2004, s’investit. Car voilà : un tel chantier dure des années et les appartements vides le sont, de fait, pour de longs mois, en attendant la mise en œuvre effective des travaux. Pour éviter cette vacance et faire profiter de ces m² libres à un public ciblé, la Be-Association, en partenariat avec Paris Habitat et le soutien de la mairie du 18e et de la Ville de Paris, s’est lancée dans le projet BeCosmo. Elle occupe de façon intercalaire 61 de ces appartements vides, répartis sur 7 immeubles de la cité Charles Hermite.
Des artistes, des artisans ou des entrepreneurs de l’économie sociale et solidaire peuvent investir ces lieux pour en faire leurs ateliers, leurs espaces de travail, de coworking ou leurs bureaux. C’est un tremplin extraordinaire pour créer, entreprendre, développer un projet d’association, construire une exposition, avoir un lieu de répétition…. Les prix sont abordables, les m² ne sont pas inutilisés, la pression immobilière redescend…
Un modèle économique unique et vertueux que Ruben Grave, co-directeur de BeCosmo, ne se lasse pas détailler. « Dans le modèle, on voulait que la surface totale à notre disposition nous permette de rendre possible des actions pour le territoire, détaille-t-il. Entre 80 et 90% des appartements sont utilisés par les artistes, les artisans et les entrepreneurs de l’ESS. Les 10 à 20% restant, on les garde pour développer des activités de service pour les habitantes et habitants du quartier. »

Une communauté soudée, multiculturelle et bienveillante

Car la vraie force du projet, c’est l’humain : une communauté soudée, multiculturelle, bienveillante… sur le même palier ! Des « petits voisins » comme le dit la co-directrice du projet Laure Hannecart, qui mêlent des habitant.e.s installé.e.s de longue date avec des résidents professionnels temporaires. « La plupart du temps, en urbanisme transitoire, c’est un bâtiment entier qui est mobilisé, explique-t-elle. Ici, nous sommes répartis dans chaque immeuble ce qui permet une grande porosité et facilite la création de liens, au milieu d’un quartier prioritaire de la ville.»

Nous ne sommes pas en concurrence avec les autres acteurs du territoire, bien au contraire

Laure Hannecart
co-directrice de becosmo
Et pour entretenir cette communauté, de multiples actions sont mises en place. Par exemple, un partenariat avec une école du numérique a été signé pour transformer quelques appartements en salle de cours. Cette école, gratuite pour les élèves, permet aux habitant.e.s de se former sur des métiers en tension à deux pas de chez eux. BeCosmo, c’est aussi le réceptacle d’associations déjà implantées dans le quartier en fournissant des locaux (pour du soutien scolaire notamment). « On agit en complémentarité avec les services existants, détaille Laure Hannecart. L’objectif n’est pas de faire du millefeuille, surtout pas. Nous ne sommes pas en concurrence avec les autres acteurs du territoire, bien au contraire », précise la co-directrice de BeCosmo.
un atelier animé par une artiste auprès des jeunes de Charles Hermite
Progressivement, la communauté a fait son nid dans la cité Charles Hermite. Si aujourd’hui, elle est bien identifiée et largement appréciée, ce n’était pas gagné d’avance. « Nous ne sommes pas arrivés en terrain conquis, explique les directeurs du projet. Ça aurait été une grosse erreur. On y va tout doucement, on s’adapte, et on cherche toujours à évoluer pour répondre aux besoins du territoire. » Cet ancrage réussi, c’est aussi grâce à Filiz Muftuoglu, responsable du site, qui fait un travail extraordinaire au quotidien avec les habitant.e.s et les résidents. Elle anime les réseaux sociaux, organise les ateliers les mercredis après-midi, accueille qui veut pour un café ou une aide administrative… Impliquée à 1 000 % dans le projet, celle qui connait tout le monde ici incarne mieux que personne BeCosmo.

Le 18e, terrain d'expérimentation d'un modèle vertueux

Le partenariat entre Paris Habitat et BeCosmo court jusqu’en mars 2026. Ensuite, l’association qui fait tant de bien au quartier volera vers d’autres horizons. « Notre projet est né dans le 18e et c’est une immense fierté. Mais en France, 3 millions d’appartements sont vides, ce qui fait environ 12 millions de m² vacants, détaille Ruben Grave. Notre objectif, c’est de déployer BeCosmo au niveau national, en ayant une démarche alignée avec notre philosophie de libérer les territoires et les liens locaux. » Les discussions sont d’ailleurs entamées pour le déploiement du projet sur d’autres sites à Paris et dans une autre métropole.

Notre projet est né dans le 18e et c’est une immense fierté.

Ruben Grave
Co-directeur de becosmo
On leur souhaite de transporter partout dans l’hexagone ce modèle vertueux, dont le 18e saisit la chance incroyable d’avoir été le terrain d’expérimentation, et profite chaque jour du dynamisme, de la cohésion, du partage. Le vivre ensemble n’a pas meilleure illustration que BeCosmo à Charles Hermite !
D’où vient BeCosmo ?
La communauté Be, spécialiste de l'hybridation depuis 2004, a souhaité renforcer son impact territorial en créant Be-Association. Be-Cosmo, porté par Be-Association (association loi 1901 à but non lucratif), est à l'écoute des communautés au cœur des quartiers. Le projet est né pour répondre à des besoins exprimés de territoire d’acteurs économiques et institutionnels du territoire.